“De quelque côté que vous regardiez désormais, vous ne verrez plus que des montagnes de calcaires dont les sommets et les cavernes s’étagent, se répètent, dépourvus de sable, de terre ou de végétation… Tantôt elles sont ajourées comme la pierre sculptée, tantôt elles se replient sur elles-mêmes, ou cessent brusquement. Leur apparence déroute notre imagination et ne permet pas de les comparer à d’autres objets. Parfois si vous les contemplez, elles vous offrent l’aspect d’animaux sauvages, ou de farouches guerriers assis, couverts d’armures et le casque en tête; parfois, c’est un chaos de cimes, environnés soudain de ces nuages de feu qu’y accumulent les jours d’été”.
C’est en ces termes que le guide Madrolle a décrit, au début du 20ème siècle, la baie d’Halong. Située au Nord-Est Vietnam, elle se distingue par la somptuosité de ses pitons calcaires immergés dans les eaux bleues du Golfe du Tonkin et par le fait de figurer sur la liste des patrimoines mondiaux de l'UNESCO.
Le secteur de la baie d’Halong (Ha-Long, Along) forme une vaste nappe protégée des vents par une ceinture de récifs, un genre de mer intérieure jadis nommée Luc Hai, la Mer bleue. Il s’étend sur les façades orientales des provinces de Quang Ninh et Thai Binh ; au nord il est bordé par la frontière chinoise, vers le large il se forme d’un labyrinthe inextricable d’îlots et d’îles s’étalant vers le Golfe du Tonkin et l’archipel des Fai Tsi Long, vers le couchant il est surplombé par les monts du Nui Thien Son, vers le sud il borde la partie septentrionale du delta du Fleuve Rouge.
Le secteur d’Halong est la ramification maritime des puissants massifs calcaires se plissant depuis le centre du Yunnan sous la poussée de l’Himalaya, il se compose de milliers d’îlots aux formes diverses et surprenantes, cônes, pitons et coupoles asymétriques ; l’ensemble s’étend sur environ 2500 km carrés et se compose de deux zones spécifiques : Halong – Cat Ba au sud-est et Ha Lam – Cam Pha au nord-est, formant ainsi des sous-baies dont Lan Ha et Bai Tu Long. Les calcaires datent du Carbonifère supérieur sur une base de calcaires marneux ou oolithiques, les principaux sommets sont le Nui Nag Tien (445 m) et la Nui Van Hoa (399 m, sur l’île de Cai Ban).
L’étymologie d’Halong vient de dragon-descendant, jadis, divers noms lui sont attribués : An Bang, Luc Thuy ou Van Don. Selon la légende locale, pour assister les Vietnamiens dans le cadre de la défense de leur pays, les dieux envoient une famille de dragons-protecteurs, ces derniers crachent des bijoux et du jade qui se transforment en îles et îlots formant une grande muraille contre les envahisseurs et les mauvais vents du nord. Diverses annales rapportent le dragon mythologique : … Dans les mers de la Chine du Sud, il existerait d’après les notices chinoises, une sorte d’anguille de mer appelée hai-ts’ieou, au corps serpentiforme très allongé, qui pourrait avoir fourni aux Chinois l’idée de leur dragon de mer, hai-long. Le hai-ts’ieou, assure-t ‘on, est un poisson long de quelques centaines de li, qui vit dans les cavernes du fond de la mer ; en sortant de ces repaires et y rentrant, il produit les marées (Madrolle, Indochine Nord).